Victor-Manuel Afonso Marques
Doctorant en sociologie
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je suis Victor-Manuel Afonso Marques, doctorant en sociologie au Centre Émile Durkheim, sous la direction d’Alina Surubaru. Je suis membre de l’axe SENS et co-animateur de l’atelier Économie et société.
Quel est ton parcours ?
Mon parcours universitaire est d’une certaine manière une « ligne droite » bordelaise. C’est à la suite de l’obtention d’un bac littéraire en Dordogne, et d’un fugace et inattendu conseil d’orientation de la part de mon professeur de philosophie de l’époque, que je suis entré en licence de sociologie à Bordeaux. J’ai rapidement accroché à cette discipline, dont je ne connaissais quasiment rien lorsque j’y suis entré. Mon seul point de contact était alors l’ouvrage Questions de sociologie de Pierre Bourdieu, que j’avais innocemment acheté après avoir présenté mes vœux postbac. Un ouvrage qui reste à bien des égards cryptique quand on ne connait rien à la sociologie ! Après la licence, j’ai poursuivi au sein du master Sociologie et sciences politiques comparatives (SPSC), durant lequel j’ai enquêté sur la numérisation du travail administratif d’une Chambre de Commerce et d’Industrie dans le cadre de mon mémoire. C’est à ce moment que j’ai développé une interrogation concernant les techniques numériques et leurs implications organisationnelles. Enfin, je suis entré en thèse à partir de la fin d’année 2019, en intégrant l’équipe de l’ANR Predict-Op coordonnée par Alina Surubaru.
Peux-tu nous parler de ta thèse ?
Ma recherche, qui se situe au croisement de la sociologie économique et de la sociologie des sciences et des techniques, interroge les conditions de convergence de deux mondes sociaux marchands, tous deux liés aux infrastructures du numérique. Plus précisément, ces deux secteurs économiques sont ceux des câbles sous-marins de communication et des centres de données commerciaux. Cette recherche part d’un constat, qui s’est durci au fur et à mesure de l’enquête, à savoir que ces deux mondes, qui participent à stocker et faire circuler les flux numériques à l’échelle mondiale, n’ont pas toujours eu à s’échanger des services économiques. En effet, ce n’est que récemment que, d’un côté comme de l’autre, les échanges marchands se sont densifiés. Se pose dès lors un ensemble de questions, générales ou plus spécifiques : qui sont ces acteurs marchands ? Comment ces mondes sociaux convergent-ils ? Sous quelles modalités (économiques et techniques) ? Qui participe (ou non), dans chacun des secteurs, à cette intrication sociale ? Comment le marché de la télécommunication en est-il reconfiguré ? Quelle place occupent les États et institutions publiques dans ce processus, notamment à l’aune de la notion de « souveraineté numérique » qui a pris de l’ampleur à la suite de la pandémie ?
Si, en France, un nombre important de travaux en sociologie se sont intéressés au « numérique » dans un sens large, ce sont surtout les imaginaires, les usages ou encore les implications politiques (démocratie) et culturelles (cultures alternatives, etc.), qui ont eu fait l’objet d’une attention soutenue. Mon regard s’oriente quant à lui vers les « couches basses » du numérique, vers des infrastructures qui sont tout à fait matérielles, et que l’on tend à invisibiliser ou à ne pas bien connaitre en temps qu’usager. Ma recherche est principalement qualitative, et s’appuie sur des entretiens, des observations participantes, une analyse de la littérature grise et une veille de la presse professionnelle.
Pourquoi avoir choisi la recherche ?
Durant mon cursus, de la licence au master, il m’a été proposé de « tester » l’activité qu’est la recherche. Que ce soit par le biais du TER ou du mémoire, il nous est demandé de formuler un problème, de lire, d’aller sur le terrain pour y enquêter, d’écrire, et de restituer à l’oral. Toutes ces opérations m’ont particulièrement plu, même si à des degrés variables, l’écriture occupant une place singulière – cela jusqu’à aujourd’hui – dans ce travail. C’est à l’issue de ces deux « épreuves » que mon goût pour la recherche s’est confirmé. Plus généralement, l’occasion qui nous est donnée d’explorer des mondes sociaux qui nous sont parfois totalement étrangers, de lire et d’apprendre de nouvelles choses de façon continue ou encore de discuter des idées, me semble justifier l’intérêt que je porte à la recherche en tant que projet professionnel, même si celui-ci tend à devenir un horizon toujours plus lointain et incertain.
Et en dehors de la recherche ?
Mes principaux passe-temps sont la lecture, le sport (karaté) et les jeux vidéo. Il faut toutefois avouer que le temps imparti à ces loisirs a fortement évoluer avec la thèse, qui reste une activité particulièrement prenante, dans tous les sens du terme.
Propos recueillis le 19 décembre 2023.
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