Soutenance de thèse Yona Abeddour

Identités marocaines en France et en Israël
Une étude de la deuxième et la troisième génération d’immigrants juifs du Maroc

Negociating and Performing Maroccan Identities
Second and Third Generation of Maroccan Jewish Immigrants to France and Israel

Thèse en cotutelle avec l'Université Abec Ben-Gurion, Israël

Thèse de science politique dirigée par Sophie Duchesne, Orit Ouaknine-Yekutieli et Haggai Ram

Membres du jury :

Joëlle Bahloul, professor emeritus, Department of Anthropology, Indiana University Bloomington (rapporteure)

Laetitia Bucaille, professeure de sociologie politique, INALCO (rapporteure)

Sophie Duchesne, directrice de recherche CNRS, Centre Emile Durkheim, Sciences Po Bordeaux (co-directrice)

Xabier Itçaina, directeur de recherche, Centre Emile Durkheim, Sciences Po Bordeaux (président)

Nadia Malinovitch, maîtresse de conférences HDR, Université de Picardie Jules Verne (rapporteur)

Orit Ouaknine-Yekutieli, lecturer, Department of Middle East Studies, Ben-Gurion University (co-directrice)

Ma recherche interdisciplinaire, "Identités marocaines en France et en Israël: une étude de la deuxième et troisième génération d'immigrants juifs du Maroc", explore le processus de formation de l'identité parmi six familles juives d’origine marocaine vivant actuellement en France et en Israël. Six récits familiaux à travers trois générations ont été documentés et explorés à l'aide d'une combinaison d'histoire orale, d'entretiens non directifs et approfondis, et d'observation participante sur une période de six ans (2016-2022). Le terrain de recherche s'étend de Paris, Lyon, Toulouse et Marseille en France à Jérusalem, Giv'at Ze'ev, Netanya et Beersheva en Israël. Le corpus de recherche comprend des données recueillies auprès d'environ 40 membres de familles, ainsi que des individus de leurs réseaux sociaux et familiaux, y compris des manuscrits, des livres, des photographies de famille et des enregistrements vidéo. L'étude examine comment les deuxième et troisième générations de ces familles racontent, affirment et négocient leurs récits sur elles-mêmes, et examine certains aspects de leurs interactions quotidiennes et de leur interprétation du monde dans lequel elles vivent. Cette recherche vise à explorer diverses questions, notamment : comment la "marocanité" est-elle perçue et exprimée dans deux contextes diasporiques distincts ? Que révèlent les politiques et les performances identitaires des familles juives marocaines de deuxièmeet troisième générations en France et en Israël sur la diasporicité, l'identité, la religiosité, la mémoire, le nationalisme et les modes de négociation et de performance qui évoluent sans cesse ? Dans quelle mesure la "marocanité" et le passé marocain façonnent-ils la formation des identités "françaises", "israéliennes" et "juives" ? Après avoir mené des entretiens approfondis avec des individus et des familles d'origine marocaine dans les deux pays, il est apparu que des différences significatives existaient dans la manière dont l'identité juive marocaine était exprimée et transmise dans chaque lieu, malgré la politique du melting-pot en Israël et l'assimilation accélérée en France. Ce phénomène était particulièrement prononcé en Israël, où la distance et l'interaction limitée avec le Maroc ont contribué à une idéalisation exacerbée du pays. Cependant, lorsque les Israéliens d'origine marocaine rencontrent le Maroc contemporain, ils peuvent ne pas le reconnaître de la même manière qu'ils l'avaient imaginé, ce qui entraîne souvent une déception. En revanche, la communauté juive en France, telle que j’ai pu l’appréhender à travers les familles enquêtées, accorde moins d'importance à la "marocanité", en partie en raison de la proximité géographique du pays avec le Maroc et de sa longue histoire de relations diplomatiques, qui facilitent les échanges culturels, économiques et civils continus. De plus, les Juifs marocains, notamment ceux qui ont opté pour la France comme destination, étaient souvent culturellement et linguistiquement français, ce qui a conduit leur "francité" à prendre le pas sur leur héritage culturel domestique. Par conséquent, la relation des Juifs franco-marocains avec leur pays d'origine est souvent plus complexe et nuancée que celle de leurs homologues israéliens. Ce phénomène souligne l'importance de comprendre l'interaction entre les communautés diasporiques, leur pays d'origine et les contextes respectifs de leurs pays d'accueil dans la formation de l'identité diasporique