Xabier Itçaina
Directeur de recherche CNRS
Quel est ton parcours et comment es-tu devenu enseignant-chercheur ?
J’ai préparé à Sciences Po Bordeaux et sous la direction de Jacques Palard une thèse en science politique portant sur les articulations entre catholicisme, identité et politique en Pays Basque. Dans ce cadre, un séjour de quatre mois à l’Université Laval à Québec en 1995, en pleine campagne référendaire sur la souveraineté‑association, m’avait donné le goût du comparatisme. La thèse a été soutenue en 2000. Après un passage à l’Université de Pau comme ATER, j’ai été recruté en 2001 au CNRS et affecté, à l’époque, au CERVL. J’ai depuis travaillé dans ce centre, devenu SPIRIT puis Centre Émile Durkheim. En 2006, un bref séjour à l’Université d’Oxford dans le cadre du GDRE Démocraties européennes (alors coordonné par Sophie Duchesne !), m’avait permis d’ouvrir un chantier comparatif entre Irlande du Nord et Pays basque quant au rôle de la société civile organisée dans les relations transfrontalières et les sorties de conflit.
En 2012-2013 j’ai effectué une mobilité de deux ans à l’Institut Universitaire de Florence grâce à une Marie Curie Fellowship, ce qui m’a permis de mener de nouvelles enquêtes en Italie, en Espagne et en France sur les médiations catholiques en Europe du Sud. Cette enquête a fourni la matière d’un mémoire d’HDR, dont Andy Smith était le garant et que j’ai soutenu en 2015 à Sciences Po Bordeaux. J’ai ensuite pris la direction du Centre Émile Durkheim de janvier 2017 à mai 2021.
Quels sont tes objets de recherche ? Sur quoi travailles-tu ?
Le fil rouge de mon travail est un questionnement sur le rôle de la société civile dans la construction et le traitement des problèmes publics territoriaux en Europe du Sud. Cette perspective générale se décline en trois objets principaux : les transformations du catholicisme social ; les dynamiques territoriales de l’économie sociale et solidaire (ESS) en général et du coopérativisme en particulier ; la sociologie historique des cultures populaires, des identités territoriales et de leurs usages sociopolitiques. J’ai aussi participé à des recherches collectives du CED, à l’image, il y a déjà quelques temps, de l’enquête sur le gouvernement européen du vin conduite avec Antoine Roger et Andy Smith dans le cadre du projet ANR GEDI (Le gouvernement européen des industries). C’est une recherche qui m’avait beaucoup appris concernant l’articulation entre secteurs et territoires, la notion de travail politique ainsi que la problématique des jeux d’échelles, qui traverse l’ensemble de mon travail.
Quels sont tes projets pour l'avenir ?
Dans l’immédiat, je suis engagé dans deux projets de recherche portant respectivement sur les trajectoires de transition en agriculture (TRANSAGRINA, dirigé par Delphine Thivet au CED) et sur les dynamiques de l’agroécologie en Nouvelle-Aquitaine (TAETERR-NA, dirigé à l’UPPA par Marion Charbonneau). Nous allons en outre héberger au CED à partir de janvier 2022 la recherche FRACTALE (Fabrication et territoires : relocalisation et écologisation des activités), financée par l’ADEME. Je participe à la structuration de plusieurs réseaux de recherche en France et en Espagne autour des dynamiques territoriales de l’ESS. Nous organisons d’ailleurs avec l’axe Identification et la Chaire TerrESS, à l’occasion des 100 ans de la RECMA (Revue internationale de l’économie sociale), une journée d’étude le 5 novembre intitulée Aux sources de l’ESS : des courants de pensée aux matrices territoriales. Je dois également mener à bien plusieurs publications, entre autres un dossier de la Revue d’économie régionale & urbaine sur les polarisations territoriales de l’ESS, que nous coordonnons avec Nadine Richez-Battesti (LEST) ; le chapitre Religion et économie à destination du Routledge handbook on religion and politics in Europe (dir. A. Giorgi et E. Fokas) ainsi qu’une monographie sur la sociologie historique de la musique populaire en Pays basque.
À moyen terme, je souhaite approfondir, avec un projet de recherche structurant, la sociologie politique comparative des articulations entre identités territoriales et dynamiques d’ESS. Une éventuelle mobilité d’un an à l’étranger pourrait être consacrée à cette préparation. À l’invitation de Sophie Duchesne et de Viviane Le Hay, je devrais m’investir progressivement dans l’équipe éditoriale du BMS (Bulletin de Méthodologie Sociologique), revue de référence éditée par Sage et hébergée au CED. Enfin, je vais bien entendu continuer à accompagner les thèses et mémoires que je dirige ou que je co-dirige, afin qu’ils parviennent à bon port dans les meilleures conditions.
Et en dehors de la recherche ?
Je consacre ce temps aux miens, à la musique et à la montagne.
" Le fil rouge de mon travail est un questionnement sur le rôle de la société civile dans la construction et le traitement des problèmes publics territoriaux en Europe du Sud.